Je les ai abandonnés…

OU comment j’ai lâché mari et enfants pour me tailler à Bora-Bora sans une once de culpabilité ni un chouïa de préparation OU ce que font vraiment les mamans quand elles se font la malle

Ok, je mens. Et pas que pour Bora-Bora.

Mais là où je mens pas, c’est que, oui je suis partie 3 jours, ciao la compagnie, j’me taille.

Bon alors en vrai, je faisais pas du tout la maligne, et j’avais préparé mon départ comme si ledit mari et lesdits enfants avaient dû survivre deux mois par moins 15 au fin fond de la steppe mongole après une explosion nucléaire (et avec le typhus).

Je te recontextualise l’affaire

Après des mois de négociations avec nosdits maris, Maman Guerrière Cla et moi réussissons donc à booker dans nos agendas 3 jours, je dis bien 3 jours de liberté absolue.

Le plus dur était fait. Restait à trouver (en plein mois de janvier) une destination de rêve alliant soleil, culture, bonne bouffe, shopping pointu et boutique hôtel.

On rêvait Florence, Marseille, Lisbonne, San Sebastian.

Et nous avons tranché, ce sera Utrecht (ne sous-estime pas le glamour de cette destination paradisiaque.)

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Et la vérité, c’est qu’Utrecht, c’est à moins de 2 heures de route, donc faudra pas chercher un vol de retour en pleine nuit si Mistinguette a une dent qui ballotte ou si Pimprenelle ne trouve plus Doudou Rose dans son lit (tssssss encore et toujours ce fantasme de la toute puissante mère  irremplaçable…)

De toute façon, je dois bien l’avouer, on aurait pu partir à Izegem ou à Valdivostok que cela nous aurait tout autant convenu. On avait plusieurs années de conversations interrompues à terminer, alors finalement la destination hein…

Bref, les semaines passent, la date du départ approche, je ne suis que fête, réjouissance, impatience et excitation.

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Arrive donc le jour J.

Je me retrouve à faire une valise pour moi toute seule… euh… quelqu’un me rappelle comment on fait ? Suis-je vraiment certaine de ne pas avoir besoin de quelques langes ? Et une boite de suppos ? Et ma trousse « occupations de salle d’attente » (à ne pas confondre avec la trousse « popo imprévu dans la culotte ») ?

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L’heure tourne, je m’en vais déposer mes filles à l’école. La Liberté guidant la mère est au bout de la cour de récré.

8H45 : Dans quelques secondes, je suis une femme libre. J’embrasse mes filles comme si je n’allais plus les voir pendant un siècle. Je passe le pas de la porte de la classe de Mistinguette. Je. suis. libre.

8H46 : cette liberté soudaine me donne le tournis. J’hyperventile et m’effondre en plein milieu de la cour de récré, en sanglotant bruyamment, je ne suis que larmes et désespoir,  accrochée à ma poussette (vide), mon sac à main se déverse au milieu de la cour, mouchoirs en boule, culotte (propre) taille 3 ans, et girafe playmobil échouent à mes pieds. Une Maman Parfaite passe et me jette un bref regard dédaigneux (car elle, quand elle part pour un week-end thalasso 5 étoiles en Normandie avec sa bande de potes, elle gère parfaitement ses angoisses de séparation et sa culpabilité de mère abandonnante).

8H48 : Je parviens à me relever, et titube sur ma poussette devenue rolator jusqu’à ma voiture. J’appelle Super Chéri en larmes, le suppliant de ne pas me laisser partir si loiiiinnnn si longtemmmmmpppppps. Il me raisonne. T’inquièèèèèète je vais gérer grave, me dit-il. Dans le brouillard de mes larmes, j’entends « hamburger chez Mc Machin », « donuts et couques au chocolat », « soirée jusque tard chez des potes » et « on oubliera le bain pour une fois ».

Je suis totalement rassurée.

A la maison, juste avant le grand départ, je planque des mots doux partout.

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3 jours c’est long, ils pourraient m’oublier. 3 jours à l’échelle d’un enfant de 2 ans et demi, ça fait au moins 10 ans à l’échelle adulte non?  Donc un éternité.  Donc le risque qu’elles oublient mon existence est bien réel. Donc soyons prudente.

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Je fais le tour de la maison (où tentera de survivre ma famille pendant 3 jours sans moi) et vérifie tout une dernière fois. Deux régimes de bananes pour les goûters, une tenue par personne et par heure, le contenu de la pharmacie familiale étalé dans la salle de bain avec mots explicatifs post-ité sur chaque boite (que faire face à une crise de choléra? comment repérer une otite purulente? qui contacter en cas de chikungunya ?).

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Maman Guerrière Cla est à ma porte. Cette fois, je n’ai plus aucune excuse. Je dois partir.

Je vois à sa mine défaite qu’elle en mène pas vraiment plus large que moi.

Je suis entrée dans sa voiture, on a démarré, on a commencé à parler. Et il s’est passé un truc incroyable : on a complètement oublié l’existence de nos maris respectifs et de nos rejetons.

Enfin, quand je dis « complètement » …

On a rattrapé nos années de conversations en retard.

Et on a passé l’intégralité du week-end à parler d’eux (mais faut pas leur dire, ça mettrait en danger cette image savamment entretenue de « nan mais moi j’ai aussi une vie riche et dense EN DEHORS de mes enfants »).

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Et durant ce week-end, on a aussi pu faire des trucs TROP dingues :

-marcher vraiment très vite dans la rue sans enfant chewing-gum au bout du bras

-dormir d’UNE SEULE traite

-avoir une conservation complète, avec un début (le vendredi matin), un milieu (le samedi après-midi) et une fin (le dimanche fin de journée)

-porter un minuscule sac à main

-faire des visites culturelles (j’ai pas dit « éducatives », ni  « familiales », juste « culturelles »)

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-entrer dans un resto sans déménager la moitié de la salle  pour installer une chaise haute et une poussette, ni s’excuser pour les hurlements stridents, ni se vautrer en dessous de la table pour récupérer le crayon jaune et, au passage, le morceau de poulet à moitié mâché mais trop chaud donc recraché …

-manger des trucs de filles (graines/légumes/chia/pesto/avocat/houmous) sans entendre « jaimepaaaaaas » ou « et elle est où la viande? parce que moi avec tes trois feuilles de salade, j’ai faim dans une heure »

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-se faire passer pour de super jeunes nanas en goguette (ce que nous sommes vraiment, on en conviendra, mais se promener avec des enfants nous donne toujours l’air plus vieilles)

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Mais en revanche nous n’avons jamais au grand jamais  :

-débrieffé sur nos rejetons et maris respectifs

-pleurniché au bout du fil en entendant leurs petites voix

-joué à une partie endiablée de Pyramide (avec un verre de Malbec, pas une tasse de camomille)

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-débattu sur la meilleure marque de soutien-gorge d’allaitement

-fait la moitié de la ville pour trouver un cadeau Nintje

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-fait l’autre moitié de la ville pour trouver un cadeau 100% testostérone

-reconnu qu’ils nous manquaient (vraiment) beaucoup

-espéré que l’autoroute Utrecht- Bruxelles soit totalement coupée par une manifestation de Femen militant pour la fin du patriarcat en Papouasie Nouvelle Guinée (et nous OBLIGEANT à prolonger notre séjour d’au moins 24H)

Et déjà, le dimanche après-midi était là.

Et nous sommes rentrées, chacune chez soi, le coeur tout rempli, la tête toute légère. A nouveau fraiches et dispos.

Et on les a retrouvés. Et ce moment-là fut tout aussi délicieux que les autres…

Car finalement après ces départs-là, loin, sans eux, et nous légèrement coupables, un rien inquiètes… il y a les retours…

Et qu’est-ce qu’ils sont bons ces retours-là…

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Bon, et sinon, on repart quand?

10 réflexions sur “Je les ai abandonnés…

  1. Gwen dit :

    Rhhhho, non seulement j’en rêve, mais en plus ton article est drôlement bien écrit !
    Bon, normalement la 2e semaine de Pâques, je bosse et ils sont chez les papys mamys, ça devrait être du même ordre je pense 😉

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    • kletmarietteetsatribu dit :

      Merci Gwen 🙂 Toute une semaine, encore mieux !!! A toi les spas, la bouffe de filles et les soirées cocktails jusqu’à pas d’heure… rien de tel pour reposer une maman guerrière (et encore plus quand elle a une vie super remplie comme la tienne 😉 ) Tu me raconteras 🙂

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