Voler les instants parfaits

OU comment capter la joie là où on l’attendait pas

En plein milieu d’un week-end par exemple. Tu sais, ce moment à la fin de la semaine théoriquement prévu pour se reposer, lors duquel dans ton ancienne vie, tu aimais ronfler jusqu’à midi, sortir jusqu’à pas d’heure et t’enfiler des séries et du chocolat au fond de ton lit.

Sauf que depuis, donc, tu as eu des enfants.

Mais ces pseudo-week-ends peuvent être une source inépuisable d’apprentissage dans toute une série de domaines de compétences essentielles.

Exemple ?

Désormais je maîtrise l’art du spaghet’ bolo sans les mains, je reconstitue  les paires d’un panier de chaussettes propres de 7 pointures différentes en suivant attentivement (et sans baver) le  13H de Laurent Delahousse, je corrige un devoir de latin de la main droite en changeant un lange de la main gauche (et sans mélanger les mains, sous peine de compromettre à tout jamais la réputation de GrandKet au sein de sa classe).

Je sais quel ailier droit et quel défenseur associer sur Fifa 16 pour faire suer l’équipe adverse. Je tiens la note sur tout le refrain de la Reine Machin Brol sans ciller, avec en prime une charmante chorégraphie consistant à mouliner les bras tout en sautillant gracieusement.  Je construis la ferme de Duplo (grange – maison –  écurie) en moins de temps qu’il ne faut pour déboucher deux petits nez au sérum phy. Avec en prime, les bruitages des animaux qui vont avec.

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En ce qui concerne l’ambiance, imagine une cantine scolaire le jour des frites, le Space Moutain en phase de décollage et une crèche bondée et surchauffée un vendredi soir, et on y est (à peu près).

Régulièrement, et à tour de rôle, nous sortons prendre un bon bol d’air, histoire, non pas de nous réveiller, (car comme tu l’imagines, rien n’incite au sommeil), mais juste de garder nos esprits au clair, pour éviter d’en arriver à en jeter un par la fenêtre (du rez-de-chaussée).

Le soir, après une heure de discussions passionnées avec les trois grands pour déterminer « quel aventurier est (je cite) trop boulet et doit donc être éliminé au conseil » ou « comment réussir un passo-doble sur des hauts talons et en combinaison moulante sans envoyer son partenaire valser dans le décor », SuperChéri et moi mettons la marmaille au lit, avant de nous écrouler dans le nôtre, puis échangeons un regard qui en dit long, avant de rabattre la couette sur nos deux, enfin quatre, oreilles (et à moitié, car tu connais l’adage, le parent ne dort toujours que d’une oreille), et de nous endormir le plus vite possible. Avec 5 enfants, le réveil impromptu est une menace permanente.

Mais dans cette ambiance hautement reposante surgissent parfois (voire souvent, je suis d’un naturel optimiste) des moments de grâce.

Oui. De grâce.

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Comme quand ils se mettent à rire, pour une raison que tu ne comprendras jamais. Parce que l’un des 5 s’est mis à faire des petits bonds, et que, quand toi tu fais pareil, plus personne ne rit. C’est leur truc bien à eux, et c’est magique. C’est un fou-rire généralisé, et qu’importe qu’il y ait un ado (pas encore) blasé dans la bande et une petite fille qui parle à peine, ils ont trouvé leur langage, et toi, tu t’inclines et tu admires.

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Comme quand dehors ça s’éclaire un peu, que Pimprenelle va chercher ses chaussures et son manteau, pour bien faire comprendre à tout le monde qu’elle veut sortir, et que les grands lui emboîtent le pas. Et qu’on se retrouve dehors, avec vélo, rollers, poussette de poupée et ballon de foot. Et que tout le monde s’illumine. Et que personne ne tombe. Et que chacun y trouve son compte.

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Comme quand ils déposent leurs jouets et leurs disputes, pour se serrer tous dans les bras, faire un câlin de famille comme ils disent, et que toi, tu restes bouche-bée, à aller chercher vite SuperChéri, sans parler, juste pour lui montrer cette tribu qui s’aime si fort et ose se le dire.

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Ces moments de grâce là, qui mangent pas de pain peut-être, qui sont pas très spectaculaires certainement, mais qui sont finalement le sens même de tout le reste…

Alors j’ouvre grand les yeux, et j’essaie d’en rater aucun…

Et le lundi matin, même si je suis sur les rotules, je me dis que finalement, mon week-end, il était pas si mal que ça…

4 réflexions sur “Voler les instants parfaits

  1. amotherinthecity dit :

    Ooooooh… j’ai tellement ri que Mister K. s’est penché sur ta prose (hommage ultime), et puis maintenant j’ai les larmes aux yeux. Il y a 4 ans, je t’aurais prise pour une folle. Aujourd’hui… je suis juste la même. Plein de bisous.

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